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Youri est au Congo
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23 avril 2005

Bilan de ma première semaine...

   

Vendredi 15 avril 2005 à 6h45 départ pour Nairobi, via Bruxelles.
Arrivé à Nairobi, j'ai dormi dans le même hôtel, dans la même chambre que lorsque nous étions partis en Tanzanie! La nuit fut très agitée. Je me suis réveillé à 1h en plein cauchemar. J'ai cru qu'il était 13h et que j'avais raté mon avion. Heureusement, il me restait encore quelques heures à dormir.

Samedi 16 avril, je prenais l'avion pour Bujumbura au Burundi et mon équipe venait me chercher à l'aéroport.
Guy et Vincent m'ont accueilli à bras ouverts et nous avons gagné Uvira, ma destination finale sur les berges du lac Tanganyika.
Pour ceux qui connaissent, Uvira ressemble un peu à Longido (Tanzanie) : des rues en terre battue, des maisons quelque peu délabrées…mais le paysage est magnifique. C'est une petite ville entre lac et montagne. Mais pour des raisons de sécurité, nous ne pourrons explorer la montagne.
Notre maison est belle et très grande, même si entourée d'un mur de 2,5m de hauteur avec barbelés et surveillée par un garde. Nous avons l'eau froide courante, l'électricité de temps en temps. Mais nous allons bientôt investir dans un groupe électrogène. La température minimale est 28°C et maximale 30°C…
Nous mangeons bien, surtout du poisson, des pâtes…notre cuisinier local essaie de nous faire une cuisine relativement européanisée.
Dès le premier jour, nous sommes allés visiter le camp réhabilité par Atlas qui peut accueillir une centaine de personnes. 4 réfugiés arrivent. Nous les aidons à décharger leurs bagages.

Dimanche 17 avril 2005.
Nous sommes conviés au pot de départ d'une association suisse de déminage, qui faute de budget doit abandonner sa mission de déminage du Sud Kivu. Le président de l'association me fait l'honneur de me laisser remettre les diplômes.
Nous visitons ensuite le port afin de négocier son coût d'utilisation pour le débarquement des réfugiés, ainsi que la construction d'un second camp plus grand. Puis nous aurons une discussion sur la sécurité dans le Sud et sur la presqu ' ile sur le lac. Les retours massifs ne sont pas encore à l'ordre du jour.
Pour l'instant, nous nous "limiterons" aux "retournés spontanés" qui reviennent en RDC par leurs propres moyens et seront dispatchés dans toute la région. 2000 personnes ont déjà retrouvé leur région d'origine en 2 mois.

Lundi 18 avril 2005.
Nous rencontrons un américain attaché de l'Ambassade des Etats Unis qui représente à lui seul 30% du budget du HCR. Nous lui présentons nos projets. Nous visitons le camp réhabilité. Il interroge une femme sur le motif de son retour. Elle lui confie préférer mourir chez elle plutôt qu'en Tanzanie. Sera ensuite abordée la question du sida. Mais la préoccupation première de ce peuple est d'avoir à manger tous les jours et d'avoir un toit au dessus de la tête.
L'américain nous fera comprendre à demi-mots qu'il est assez facile de gérer les flux de réfugiés vers la RDC : il suffit de faire varier la distribution de nourriture dans les camps en Tanzanie. Moins les gens reçoivent à manger là-bas, plus ils auront envie de rentrer chez eux….

Mardi 19 avril 2005.
Nous partons dans une région plus reculée. Nous rencontrons quelques personnes avenantes avec lesquelles nous entamons une discussion. Ils affirment être pour le retour des réfugiés en particulier pour les élections qui doivent avoir prochainement lieu même si elles ont été reportées en juin et qu'elles risquent à nouveau d'être reportées.
Les habitants nous expliquent que le gouvernement ne paie plus l'armée. Beaucoup de militaires deviennent des mercenaires, d'où le climat d'insécurité et le nombre important de viols. A l'issue de cette discussion, l'américain confiera sa réticence à un retour massif des réfugiés vers le Sud Kivu.
Nous rencontrons ensuite l'administrateur du territoire et nous visitons l'hôpital local, qui est dans un délabrement total. L'équipe médicale est constituée de 2 médecins. La table d'opération est une plaque de tôle sur 2 tréteaux. A la maternité, les femmes dorment à même le sol. Le stock de médicament est dérisoire. Même ma propre pharmacie en contient plus.
Le repas pris à la paroisse sera très silencieux. L'abbé vient nous avertir qu'une exécution va avoir lieu sur la place du village. Il s'agit d'un militaire ayant volé dans un champ de manioc. Le propriétaire et sa femme ayant tenté de s'interposer, le militaire leur a tiré de dessus et le mari est décédé. L'abbé nous posera alors un cas de conscience : comment, nous les ONG, pouvons espérer faire appliquer les droits de l'Homme dans ce pays alors que même le gouvernement et l'armée ne les respectent pas?
Nous assisterons impuissants à la fusillade du criminel. L'après-midi, nous rencontrons alors le commandant Nguvu, responsable du groupe armé de la région. Il nous explique qu'un tribunal d'urgence avait été constitué. Le jugement a été rendu en 10 minutes car le militaire devait être enterré en même temps que sa victime.

Mercredi 20 avril 2005
Nous sommes de retour à Uvira. Nous recherchons une personne pour un poste d'assistant logisticien achats. Guy me confie avoir reçu de très chaleureuses recommandations d'un colonel pour la candidature de son fils. Les recommandations se sont transformées en menace de mort proférées à l'encontre de Guy. Je décide donc d'organiser une réunion avec le Colonel et ses conseillers afin de lui expliquer que notre choix était fait en toute impartialité, avec tests et CV à l'appui, parmi 800 personnes. Et que son fils, avait malheureusement de moins bons résultats que d'autres personnes. A force de persuasion, le Colonel finit par comprendre et l'affaire est close mais Guy reçoit toujours des menaces de mort par texto d'une autre personne….
Je suis donc entré dans le bain dès mon arrivée…dire que nous allons "gérer" la vie de plusieurs milliers de réfugiés….
Sinon, en ce qui concerne les détails pratiques, nous avons une journée de repos par semaine (le dimanche), nous ne sortons qu ' accompagnés, nous ne conduisons pas et nous respectons le couvre-feu.

Pour ce qui est de ma boite mail, je ne pourrai la relever qu'une fois par semaine environ. Pour ce qui est du blog, c'est Delphine et Jérôme qui le tiendront à jour pour que vous puissiez suivre mes aventures.
J'ai déjà reçu plusieurs demandes d'aide, dont celle d'une école qui avait fait reconstruire ses classes. Malheureusement, une importante inondation en janvier a presquetout détruit. Le budget pour réhabiliter une salle représente 800$. Il y 8 salles au total.
Si Mr. Roland Granottier a toujours envie de monter son projet humanitaire, il peut commencer à organiser une collecte… Aujourd'hui vendredi, c'est la routine. Je suis en train de préparer un plan sécurité et un plan d'évacuation en cas de problème. Bilan de la première semaine : nous avons d'ores et déjà organisé 3 convois en direction de Baraka qui se sont très bien passés.

A bientôt.

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Commentaires
C
la dur réalité du monde frappe souvent en plein visage. Merci à nos deux "administrateurs" de choc et à notre envoyé "très spécial".
M
Merci à toi Delphine, merci à toi Jérôme pour cette correspondance que nous pouvons avoir avec notre cher Youri.Merci à vous tous qui pensez trés fort à Youri et surtout mille fiertés à mon fils unique et préféré. Bisous Maman
E
Une semaine à peine et c'est déjà une leçon de vie que tu nous communique...<br /> Mes petits tracas quotidiens me semblent bien futiles.<br /> Merci de nous faire partager un peu de ton expérience grâce à ce blog<br /> <br /> Bises
Youri est au Congo
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