Des drapeaux rouges
Sur tous les axes routiers utilisables de notre région se trouvent divers centres de santé appuyés ou non par des ONG internationales. Ce ne sont pas des hôpitaux, car bien souvent ils ont des moyens limités à quelques médicaments et du personnel médical local de base. Ainsi, ils s’occupent des petits soins et se battent avec leurs possibilités. Ils ont donc beaucoup de mérite car la demande est élevée.
Cela dit, parfois ils s’avouent impuissant devant certains cas d’extrême urgence ou des malades à un stade avancé.
C’est pourquoi ils affichent un petit drapeau rouge au bord de la route lorsqu’ils ont besoins d’aide pour évacuer un malade vers l’hôpital de Uvira. Notons que cette institution a aussi ses difficultés en termes de médicaments, en ressources humaines et matérielles.
Nous sommes souvent sur l’axe Baraka Uvira pour nos activités, parfois à vide. Ainsi, depuis que je suis ici, j’ai pris mes responsabilités pour venir en aide à une maman dont le nouveau né souffrait d’anémie avancée, et à un motard avec une vilaine double fracture de la jambe. C’est plus ou moins interdit par les ONG car leurs responsabilités ne seraient être retenues en cas de problèmes sur la route. Le nouveau né aurait pu ne pas finir le voyage en vie et des rumeurs circulant ici beaucoup plus vite qu’une voiture, on aurait pu être accusé d’avoir attenté à sa vie. Ca peut être une source de problèmes sans fin.
Alors cette semaine, lorsqu’on s’est arrêté à l’approche de Swima (voir la carte) au centre de santé appuyé par AMI, j’avais toujours quelques doutes.
Le référent médical tout affolé nous annonce qu’une maman a des complications dans sa grossesse tardive et qu’elle souffre énormément. Son évacuation semble à son avis la seule chance de la sauver et éventuellement garder son bébé.
Comme la procédure théorique et non officiel que nous avons entre AMI et les autres gentils ONGI qui se proposent de donner leur aide en cas de drapeau rouge, un référent médical ou une infirmière doit nous accompagner pour ce convoi sanitaire. Aujourd’hui, le staff médical présent au centre est plus que réduit et personne ne peut nous accompagner pour ce voyage.
Cas de conscience, prise de responsabilités, il faut choisir et vite car on entend d’ici les cris de la malade dans le centre.
Bon évidemment il faut se jeter à l’eau, faire une petite prière pour que tout se passe bien pendant le voyage et que l’hôpital d’Uvira saura l’accueillir et la soigner en urgence.
C’est parti, on allonge à l’arrière la pauvre femme qui souffre le martyrs. Son mari et sa sœur l’accompagnerons et la soutiendrons dans cette épreuve.
La route est défoncée et le voyage devrait durer une heure trente environ mais chaque virage fait frémir la maman, chaque freinage la fait souffrir et chaque bosse la fait crier. Pourtant il faut arriver au plus vite. Mon chauffeur joue des coudes avec le terrain, accélérant quand il le peut, prudent dans les passages délicats, les ornières et les guets.
Les barrières habituelles des militaires sont pour elle quelques pauses bienvenues dans cette douloureuse expédition. Elle supporte et elle endure courageusement tous les kilometres.
Enfin on entre dans Uvira, l’hôpital est proche. A notre arrivée, elle est tout de suite prise en charge par le médecin chirurgien qui, on l’espère va faire des miracles.
Cette épisode hors de notre mission
ici a eu lieu hier après midi, et ce matin, nous n’avons pas encore de nouvelles
de la maman et de son bébé.
Note de Jérôme : Carte en 3 parties (image de base trés grande non supportée par le Blog)